En promulguant la loi travail le 9 août, le président de la République a ainsi officialisé et confirmé les privilèges des employeurs. Cela équivaut en résumé à un code du travail dans chaque entreprise. Puisque les accords d'entreprise sont privilégiés, ça signifie :
- négociation dans chaque entreprise entre le patron et les IRP (instances représentatives du personnel – CE, élus, CHSCT, délégués du personnel),
- à défaut d’IRP et de syndicats, c’est le patron qui décide après référendum (consultation des salariés),
- ce n’est que faute d’accord que le code du travail (nouvelle mouture) s’applique.
C'est l'inversion de la hiérarchie des normes, puisqu'on fait sauter le verrou que constituait la branche en affirmant dans la loi que l'accord d'entreprise est premier et que c'est uniquement lorsqu'il n'y a pas d'accord d'entreprise que l'accord de branche s'applique. Et la loi dit bien que dans cet accord d'entreprise, par exemple, on peut diminuer la majoration des heures sup' à 10%, et ainsi être moins-disant par rapport à la branche et à la loi etc. Donc il y a bien un mécanisme d'inversion de la hiérarchie des normes selon un spécialiste du sujet, Jérôme Pélisse, professeur de sociologie à Sciences Po.
Certains (la CFDT par exemple) pensent que négocier au niveau de l’entreprise plutôt que de la branche permet de produire des règles plus adaptées, et ainsi plus légitimes et donc, aussi, mieux appliquées. Mais dans une période de chômage de masse comme actuellement, chacun peut constater qu'on est dans une forte situation de déséquilibre des rapports de force. Le chantage à l'emploi, individuel et collectif, d’un employeur envers ses salariés, ça existe, les exemples ne manquent pas.
Voilà pourquoi plus de 70% de la population est opposé à cette loi travail, et que le gouvernement Hollande-Valls est passé en force avec le 49-3 pour la mettre en place.
Il est bon de rappeler quelle était la position du PS il y a un an sur ce même sujet. Il s'était engagé à renforcer la hiérarchie des normes, c'est écrit noir sur blanc dans le texte de la motion majoritaire présentée par Cambadelis lors de leur Congrès du 5 au 7 juin 2015 à Poitiers.
Texte de la Motion A intitulé LE RENOUVEAU SOCIALISTE
On y trouve un sous-chapitre « Renforcer la démocratie sociale et les droits des salariés » avec tout de suite précisé « Dans l’entreprise, les salariés, pour être respectés, doivent avoir des droits. C’est pourquoi nous disons qu’il faut un Code du travail alors que la droite et une partie du patronat y voient une atteinte à la liberté d’entreprendre. » Et un peu plus loin « La démocratie sociale que nous devons construire doit s’appuyer sur un syndicalisme fort et respecté, constructif sur l’innovation, intransigeant sur les régressions sociales. Et puis, il faut rétablir la hiérarchie des normes : la loi est plus forte que l’accord collectif et lui-même s’impose au contrat de travail. »
Et devinez qui on trouve parmi les signataires de cette motion ? Manuel Valls, Myriam El Khomri, qui sont les principaux artisans avec le Medef de cette loi travail, et plein d'autres membres du gouvernement. C'est comme quand Hollande se disait ennemi de la finance. Mais au final, ils finissent par faire le contraire de ce qu'ils déclaraient.
Si cela ne vous suffit pas à comprendre la vraie nature du PS, vous pouvez toujours continuer à voter pour eux, mais sachez que ce ne sera jamais un vote de gauche !