22 avril 2022
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De Odette NILÈS Officier de la Légion d’Honneur, ancienne internée du camp de Châteaubriant
Monsieur Macron, dimanche 24 avril, je mettrai un bulletin de vote à votre nom dans l’urne, sans adhésion aucune à votre projet mais par fidélité à mon combat contre le fascisme et pour la jeunesse.
En 1941, à 17 ans, j’ai été arrêtée par des policiers français, lors d’une manifestation anti-Allemands à Paris, sur dénonciation, parce que jeune militante communiste drancéenne. J’ai connu les interrogatoires, l’enfermement, la faim, le froid pour avoir voulu défendre mon pays et mes idées. Mais j’ai aussi eu l’honneur de rencontrer, notamment, Jean-Pierre Timbaud, dirigeant syndicaliste CGT, et Guy Môquet, étudiant de 17 ans comme moi.
Je suis, à 99 ans, la dernière survivante à les avoir vu partir pour la mort, le 22 octobre 1941, en hurlant la Marseillaise. Guy Môquet nous a laissé, du haut de ses 17 printemps, une maxime qui aujourd’hui encore est ma raison d’être : « Les copains, qui restez, soyez dignes de nous, les 27 qui vont mourir. » Témoin et actrice de cette époque douloureuse de l’Occupation où régnaient en maîtres les nazis et leurs serviteurs français, pétainistes, je ne peux accepter que les thèses de l’extrême droite se propagent à nouveau. Je ne veux pas qu’ils s’approprient notre drapeau tricolore et encore moins la Marseillaise, qui a donné le courage à mes camarades d’aller affronter la mort pour notre France. Je ne peux les laisser se présenter en défenseurs de la patrie quand ils font l’apologie des traîtres de tous pays et qu’ils témoignent tant de mépris pour notre devise de la République : « Liberté, Égalité, Fraternité. » Ces valeurs qui rassemblent tous les démocrates et toute notre population, issue de la diversité des migrations, de la décolonisation et des conflits.
Sachez qu’à mon âge, jamais je ne baisserai la garde et ne vous permettrai de prendre mon vote pour acquis. Je veux que ce qui nous animait en 1945, ces« Jours heureux » qui ont forgé la Sécurité sociale, le service public et la reconnaissance du travail, vous les portiez comme un rempart contre la haine et le fascisme. Votre jeunesse ne peut rester sourde à mon parcours et à mes mots qui sauront être une boussole pour les générations à venir.
De Carine PICARD-NILÈS Présidente de l’Amicale de Châteaubriant. Voves-Aincourt-Rouillé
Le racisme et le fascisme ne sont pas des opinions mais des délits punis par la loi. Nous perpétuons, au sein de l’Amicale, la volonté de rassemblement, au-delà des divergences politiques ou religieuses, contre toutes idéologies de haine ou de violence. A-t-on jamais vu des membres des partis d’extrême droite dans les grandes manifestations revendicatives des travailleurs alors qu’ils se targuent de les soutenir ? Eux, dont les dirigeants font partie des premières fortunes de France. Dimanche 24 avril, je m’opposerai donc à un ennemi fasciste en mettant un bulletin pour un adversaire politique dont je ne partage pas les idées libérales, mais que je combattrai fermement. M’abstenir serait un consentement à l’extrême droite.
De Maïté PINÉRO journaliste et écrivain. Correspondante en Amérique Latine (1984-1989) pour L'Humanité.
Extraits :
« ... la détermination du PCF à faire barrage en utilisant le seul vote à disposition, même si Macron demeure notre adversaire, ne se négocie pas. Combattre la politique Macron est une chose, se battre au pied-à-pied contre l’institutionnalisation du néo-fascisme en est une autre, et encore une autre de devoir le faire face aux meutes. Marine le Pen, qui n’a rien modifié de son programme raciste, peut bien tenter d’être présentable, elle a déjà un Zemmour comme inspirateur des futures milices.
Je voterai Macron car je sais que les migrants sans-papiers de ma rue seront sinon, tôt ou tard victimes potentielles de lynchage et expulsés. Je voterai Macron en pensant à cette dernière nouvelle qui vient du Chili, des travaux au stade national qui ont exhumé des ossements; Je voterai Macron en pensant aux fosses communes qui restent encore à découvrir dans toute l’Espagne, à celles de La Commune dont on sait qu’elles existent mais dont plus personne ne se soucie; Je voterai Macron car je sais qu’avec Le Pen, les combattants de première ligne, salariés en lutte et tous mes camarades trouveront en face d’eux des tueurs invités à passer à l’acte, avant officialisation du permis de tuer.
Le racisme est l’abécédaire de la haine qui libérera demain toutes les composantes du fascisme. Alors, je voterai avec rage mais sans hésitation, car je ne veux pas avoir demain du sang sur les mains. Et s’il coule, j’irai le cracher à la figure des dirigeants politiques qui l’auront permis ... ».