Les éditions Fakir publient un livre collectif « Vive la banqueroute ! ». En dix brefs récits, cet ouvrage raconte comment nos grands hommes (Sully, Colbert, Talleyrand, Poincaré, etc.) furent plus radicaux dans leurs actes que ne le sont aujourd’hui ATTAC ou Jean-Luc Mélenchon dans leurs discours. Suivi de « L’irréalisme, c’est eux ! », entretien avec l’économiste Frédéric Lordon. Voici un extrait du prologue.
Yves Calvi, animateur de C dans l’air : « Le seul enjeu de 2012 ne doit-il pas être la réduction de la dette française et les moyens proposés pour y arriver ? »
Nicolas Baverez, du Point : « Oui. »
Nicolas Beytout, des Échos : « Si. »
Jean-Pierre Gaillard, de LCI : « Bah oui ! »
Philippe Dessertine, professeur de finance et de gestion, qui signe régulièrement dans Libération : « Bien sûr... C’est bien tout le problème. »
Yves Calvi : « Tout le monde est d’accord ? »
Nicolas Baverez : « Il n’y a pas d’alternative au désendettement de l’État. » (France 5, 14 septembre 2011).
Cette petite musique, nous la connaissons par cœur.
La dette est à payer.
L’austérité, nécessaire.
Les réformes, impératives.
Sur tous ces points « il ne devrait pas y avoir de débat », prévient le Cercle des économistes. Qui ajoute : « la rigueur n’est pas un choix », « la priorité, c’est de réduire la dépense, et ce de manière enfin radicale ». La crise est « l’occasion de renoncer aux illusions sur l’État protecteur et de faire enfin le pari audacieux en faveur du marché ».
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On constate que la Grèce qui n'en finit plus de répondre aux plans d'austérité imposés par les maîtres du FMI s'enfonce de plus en plus dans la débâcle. Preuve, son endettement s'accroît; il est passé de 158% de son PIB en 2011 à 178% en 2012, prévu à 190% en 2013.
« La banqueroute est nécessaire une fois tous les siècles, afin de mettre l’État au pair. » Qui théorise cette saine gestion ? Un fantaisiste ? Un pamphlétaire ? Pas du tout : l’abbé Terray, qui exerçait comme contrôleur général des finances de Louis XV. Qu’on imagine alors ses homologues contemporains, un Pierre Moscovici, un François Baroin, un ministre de l’Économie s’exprimant avec pareille audace ! À relire notre histoire de France sous cette lumière, on éprouve comme une jouissance anachronique à cette habitude qu’avaient prise les monarques de régler leurs comptes, pour de bon, aux créanciers…
Au fil des siècles, ceux qui ont pris des mesures brutales ne sont pourtant pas des extrémistes. Et il y a certes de la facétie à les avoir pour héros, ces Sully, ces Colbert, ces Talleyrand, ces Raymond Poincaré même, tous ces personnages ambigus, plutôt conservateurs, qui ont leur place dans les manuels scolaires et leurs statues au carrefour de nos villes.
Et l’on ne se berce pas d’illusions : ces banqueroutes, eux ne les ont pas menées pour le bien du peuple, qu’ils visaient rarement. Au mieux, pour la grandeur du royaume, pour le service de la France. Au pire, pour un mariage royal, pour un palais ruineux, et, le plus souvent pour des guerres incessantes.
Même : dans les faillites qu’ils déclaraient, l’injustice était de mise. Le spéculateur proche du prince, les plus puissants financiers, échappaient bien souvent aux sanctions et rétablissaient vite leurs positions. Mais ainsi ont-ils construit l’État, ces grands hommes officiels : entre autres, par des banqueroutes régulières. Par la spoliation des rentiers. Par l’annulation calculée des dettes. Voilà une autre « leçon de réalisme » à retenir.
Vous pouvez commander ce livre sur la boutique de Fakir ou en adressant un bon de commande ou dans une bonne librairie.
140 pages, Prix : 6 euros, Frais de livraison inclus